Comment calculer le tarif d’une prestation en traduction

Comment fixer son prix en traduction, hors droits d’auteur ? C’est une question récurrente en début de carrière, face à une clientèle nouvelle ou lorsque le moment est venu d’augmenter nos honoraires. Du devis à la facturation, voici un rappel des maillons de votre chaîne financière pour fixer un tarif juste, respecté par votre clientèle.

Calculer sa rémunération grâce à un plan d’affaire

Il ne suffit pas de bien traduire pour gagner sa vie à la hauteur de son travail. Encore faut-il adopter une démarche entrepreneuriale et parler chiffres un minimum. Pour cela, commencez par compléter le prévisionnel financier de votre entreprise de traduction sur cinq, trois ou même un an en déterminant vos charges et vos frais professionnels, et vos souhaits de rémunération. L’objectif ? Calculer le chiffre d’affaires annuel à atteindre pour éviter de naviguer à vue.

Nous vous conseillons d’utiliser CalPro, l’outil dédié aux métiers de la traduction et de l’interprétation, téléchargeable gratuitement.

Dans ce fichier de calcul, remplissez la trame indicative de vos entrées et sorties d’argent pour une année :

  • frais fixes (dépenses incompressibles)
  • charges sociales selon les modes d’exercice
  • cotisations retraite complémentaire
  • assurances (RCP, mutuelle, revenus de remplacement)
  • adhésions aux associations professionnelles • télécommunications (abonnements)
  • informatique (renouvellement matériel et contrat maintenance)
  • expert-comptable
  • objectif de rémunération (revenus nets)

Une fois remplis tous les postes de dépense et les entrées, vous obtenez le coût total annuel de votre activité de traduction. C’est le montant des recettes nécessaires pour couvrir vos frais professionnels et atteindre la rémunération souhaitée, celle qui permet de satisfaire vos besoins financiers personnels, en prévoyant les baisses d’activité.

Comment calculer le juste prix d’une traduction : les coûts cachés

De nombreuses tâches gravitent autour de la production d’une traduction, ne sous-estimez pas le temps que vous y consacrez. Votre tarif doit couvrir, au minimum, les impondérables chronophages suivants :

  • recherches documentaires et terminologiques
  • révisions et relectures
  • tâches administratives (devis, factures, relances, etc.)
  • relation client (mises au point téléphoniques ou par e-mails)

Vos honoraires doivent aussi couvrir les coûts inhérents à votre activité professionnelle : frais d’équipement (internet, téléphone, loyer, consommables, boîte à outils matérielle et logicielle, frais bancaires, etc.), impôts et cotisations selon votre statut (libéral, micro-entreprise, etc.), formations et outils de veille (abonnements à des publications), prestations sociales, etc.

Le cas échéant, demandez à votre comptable ou à votre association de gestion agréée (AGA) de vous aider à faire la part des choses, notamment si vous débutez dans la profession.

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Illustration le juste prix d'une traduction

Pourquoi la mission d’interprétation est-elle facturée à la journée ?

La mission comprend la ou les journées d’intervention mais aussi le ou les jours de préparation, déterminants pour la réussite du projet. Par ailleurs, une mission, quelle que soit sa durée, bloque la journée entière de l’interprète qui refuse toute autre sollicitation le même jour. Pour cette raison, même une seule heure d’interprétation effective donne lieu à une tarification à la journée. En revanche, dès dépassement des horaires prévus, une facturation supplémentaire à l’heure peut s’appliquer.

Connaître son taux de productivité

Pour connaître la rentabilité de votre activité de traduction, il est essentiel d’estimer votre productivité, à savoir le nombre de mots traduits par jour en moyenne selon le type de document. Mais, comme le montre l’iceberg, votre travail inclut aussi beaucoup de tâches connexes, non productives mais indispensables.

Traductrice et rédactrice de supports de marketing et de communication en anglais pour l’industrie, l’innovation et la haute technologie, Sara Freitas recommande la démarche suivante :

« Commencez par déterminer votre temps de travail annuel en déduisant le nombre de semaines de vacances souhaitées et le temps, en jours, que vous consacrez aux tâches non productives de votre métier. Admettons donc 210 jours de production théorique par an. Desquels, par prudence, vous ôterez 15 % de période creuse. Résultat : 178,5 jours de production réelle par an.

Divisez ensuite votre chiffre d’affaires obtenu à l’issu de vos saisies dans CalPro par ce nombre de jours pour obtenir le montant HT à facturer par jour travaillé. Admettons un résultat de 60 000v€ divisé par 178,5 jours, cela donne 336,13 € HT par jour travaillé.

Pour facturer ce montant à partir d’une capacité moyenne de traduction de 2 000 mots par jour, votre tarif au mot doit être de 0,168 voire de 0,17 € ! Et votre tarif horaire minimum doit être de 42 € si vous travaillez 8 heures par jour. Une fois que vous avez fixé le tarif en dessous duquel accepter une mission de traduction n’est pas rentable, ne transigez pas car il est ensuite très difficile de l’augmenter auprès d’un même client ou d’une même cliente.

Il vous reste à évaluer si ce tarif vous permet de financer les frais non récurrents, les coûts cachés, que vous n’avez pas intégrés à CalPro. Une autre possibilité consiste à en intégrer certains dès le départ, en allouant notamment un montant fixe de formation annuel. Cette base vous permet déjà de savoir combien vous pouvez éventuellement consacrer à ce genre de dépense et d’investissement… et surtout de savoir s’il faut augmenter vos tarifs et de combien ! »

Si établir votre tarif de traduction est un casse-tête, des membres de la SFT peuvent vous aider. Avec Boussole, notre programme de mentorat, vous bénéficiez d’un accompagnement personnalisé dans le cadre duquel vous pourrez soumettre toutes vos interrogations.

Définir sa clientèle cible

Analysez le type de projets de traduction que vous attribue votre clientèle pour identifier les plus rentables, ceux dont le prix couvre le temps passé en tâches productives et non productives. Ne vous y trompez pas : les missions les mieux payées valent-elles le temps ou les efforts que vous y consacrez ? Des travaux moins bien rémunérés mais plus faciles ou moins longs ne seraient-ils pas finalement plus rentables ? Mais quid de votre investissement à long terme ? Dans l’idéal, que préférez-vous ? Une variété de petits projets qui sautent d’un sujet à l’autre ou des projets plus lourds qui vous accaparent trois semaines ou trois mois mais qui valorisent votre expertise ?

Dans quelle mesure pourriez-vous sacrifier la rémunération au plaisir ? Songez à ce qui vous épanouit lorsque vous traduisez : la thématique, la variété, le prestige, la publicité induite, la relation client, la possibilité d’évolution…

Enfin, analysez la proportion des projets idéaux : ceux qui rémunèrent à la hauteur de la tâche et que vous appréciez. Concentrez-vous sur l’acquisition de cette clientèle idéale et mettez tout en œuvre pour en faire votre clientèle principale.

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Illustration diagramme de Venn

Tout a un prix, y compris les prestations de traduction. Un travail rapide se paye, une qualité professionnelle également. Si le projet vous tient à cœur, vous pouvez tenter un compromis : sélectionner ce qui doit impérativement être traduit de ce qui peut ne pas l’être, résumer le document original, proposer une traduction pour information qui ne met pas les formes mais s’attache au message central ou rallonger le délai de livraison ?

Bien formaliser ses devis de traduction

La formalisation des besoins en traduction passe par l’émission d’un devis, gratuit ou non selon l’envergure du projet, en bonne et due forme, qui valorise votre travail et encourage votre clientèle à respecter vos prestations et vos tarifs.

Ce document de communication indispensable synthétise les informations relatives à la nature et au format du document traduit ainsi qu’à ceux du livrable escompté. Outre les mentions obligatoires (raison sociale, numéro SIREN, bon pour accord, durée de validité, etc.), il rappelle les langues sources et cibles, les quantités à traduire en nombre d’heures ou de mots, le prix unitaire et total, les délais et les modalités de paiement. En plus de la date de livraison, vous pouvez détailler les étapes du projet, la relecture par une tierce personne, le nombre d’allers-retours de modification inclus, le contrôle éventuel d’un bon à tirer (BAT), etc. Il doit obligatoirement être signé par votre commanditaire.

Plus votre devis de traduction sera détaillé, moins votre clientèle et vous aurez de (mauvaises) surprises.

Les conditions générales de prestations de service de traduction

Adopter une posture entrepreneuriale qui inspire la confiance, et donc favorise l’acceptation de vos tarifs, c’est être à même de présenter des conditions générales de prestation de services (CGPS). Si elles s’apparentent au pot de terre contre le pot de fer face aux conditions d’achat d’une agence de traduction, vous devez en revanche les imposer à votre clientèle directe.

À l’instar des conditions générales de vente, les CGPS définissent les droits et devoirs des deux parties. Vous devez les joindre à chaque devis et requérir la signature de votre commanditaire.

Vous n’avez pas de conditions générales ? La SFT en a rédigé pour vous ! Vous pouvez vous en inspirer ou les reprendre à l’identique. Le cas échéant, attention toutefois à les faire valider par un juriste si vos missions sortent du cadre décrit dans les CGPS de la SFT.

Le bon de livraison et la facture de traduction

Accompagnez votre livrable d’un bon qui attestera la bonne réception de votre traduction et son acceptation conformément à vos CGPS.

Sur votre facture, n’oubliez pas les mentions obligatoires françaises qui dépendent de votre statut d’exercice (coordonnées, numéro SIREN ou de TVA intracommunautaire, code APE, tarif à l’unité, etc.) et de celui de l’entreprise acheteuse (UE, hors UE, etc.). En cas de doute, sollicitez votre comptable.

Lisez attentivement les conditions générales d’achat (CGA) le cas échéant, et le bon de commande (BDC) de l’acheteur ou de l’acheteuse de traduction. Ils ne doivent pas contredire vos CGPS ou vous être défavorables.

Sept critères pour fixer un tarif de traduction :

 

 

 

 

 

 

 

 

(recherches, traduction et révision)

(généralement exprimé en nombre de mots du document source)

 

 

Les enquêtes tarifaires en traduction

Pour mieux connaître les modalités de tarification de la profession, la SFT réalise ponctuellement des sondages.

Les résultats de ces enquêtes statistiques reflètent les pratiques appliquées par les personnes interrogées, 900 en moyenne, membres et non-membres du syndicat. Ils sont un constat à instant T et ne constituent en aucun cas des recommandations de la SFT. La dernière enquête, réalisée en 2015, est comparée à celle de 2008.

Que retenir de ces enquêtes ?

L’application d’une facturation minimum : 7 prestataires sur 10 ne travaillent pas en dessous d’un seuil minimum. Ce montant va de 15 à 24 euros pour 1 prestataire sur 5, soit une tendance à la hausse marquée depuis 2008.

L’application d’une majoration :

  • pour traduction urgente. 1 prestataire sur 2 applique une majoration de 10 à 50 % ;
  • pour travail de nuit. 3 prestataires sur 10 appliquent une majoration et 1 sur 4 applique une majoration de 10 à 50 % ;
  • pour des documents originaux mal rédigés. 1 prestataire sur 10 applique une majoration de 10 à 50 % et 1 sur 10 facture à l’heure dans ce cas.

Pour tout savoir, téléchargez l’analyse des données cumulées des enquêtes 2015 et 2008 et de la base d’adhérents 2015 de la SFT. L’enquête dédiée à la traduction est aussi à votre disposition.

Et les interprètes ?

Que révèle l’enquête de 2016 de la SFT sur les pratiques tarifaires en interprétation ?

Une amplitude des tarifs selon divers facteurs :

  • Le type de clientèle : avec une clientèle directe, 59 % déclarent facturer plus de 601 € (635 € à Paris). Vingt et un indiquent des honoraires journaliers supérieurs à 800 €. En agence, sans surprise, les tarifs sont moindres.
  • Le type d’interprétation : l’interprétation simultanée enregistre les moyennes les plus fortes.
  • L’emplacement géographique : les interprètes d’Île-de-France affichent des tarifs supérieurs à ceux des autres régions françaises. 61 % facturent plus de 551 € par journée, contre 53 % sur le reste du territoire.

Une pratique de la facturation à la demi-journée : 57 % des personnes interrogées l’appliquent. Certaines facturent des demi-journées supplémentaires pour leur temps de déplacement, aussi appelées « frais d’approche ». Toutefois, la SFT souligne que la facturation à la demi-journée n’est pas une pratique recommandée.

Pour en savoir plus, téléchargez l’enquête dédiée à l’interprétation.

Droits d’auteur

Quels sont les tarifs en traduction littéraire ? Pour le savoir, consultez l’enquête de l’Association des traducteurs littéraires de France réalisée en 2012 et 2015.

Concernant la traduction audiovisuelle hélas, pas de sondage, mais une recommandation vitale de l’Association des traducteurs-adaptateurs de l’audiovisuel (ATAA) : être en contact direct avec les commanditaires afin de négocier. Voici toutefois quelques documents de référence :

Pour en savoir plus, reportez-vous à nos fiches métier.